Suite à la demande de plusieurs d’entre-vous sur la distinction entre séduire et être séduisant. Voici un élément de réponse qui me parait essentiel.
Bonne lecture.
De la difficulté
Dans votre magazine Intelligent Life de novembre/décembre, vous trouverez un excellent article sur la difficulté comme moteur. Parlons-en.
Si j’écoutais le vieux con en moi, je vous dirais qu’aujourd’hui, nous vivons dans une génération de chiffes molles qui va au plus aisé, au moindre effort. Heureusement, les rencontres que je fais chaque jour me prouvent le contraire. Reprenons l’exemple de Jack White, guitariste des White Stripes, qui comme l’explique Ian Leslie, choisit toujours la difficulté à la facilité. Il va jouer sur des guitares merdiques qui se désaccorderont, les positionnera de façon à rendre son jeu plus difficile… Pourquoi? Parce qu’il fuit comme la peste ce qu’il qualifie de pandémie de l’easy of use. Et que les bénéfices qu’il en retire sont incroyables.
L’article vous montrera aux travers de la typographie, des informations parasitaires et de la “désirable difficulté” que lorsque vous renoncez à la voie de la facilité, le gain vous sera plus profitable plus longtemps. “Désirable difficulté”. C’est beau comme concept.
Désirable difficulté
Un exemple personnel. Il y a quelques semaines, j’ai proposé à un client potentiel un projet de revampage de sa stratégie “réseaux sociaux”. J’ai étudié sa stratégie (ou plutôt, l’absence de stratégie d’ensemble), ai identifié ses besoins et ai conçu le projet, au chaud, sur la banquette en cuir d’un café du 5ème. J’aurais pu lui présenter mes notes dans mon beau carnet rouge, mais non. Je lui avais préparé un dossier comme j’aimerais qu’on m’en présente plus souvent. Je me suis appliqué, je l’ai refait plusieurs fois. Je m’étais cassé le cul et j’en étais fier. Mais lorsque nous nous sommes rencontrés, je savais que j’étais irréprochable de ce côté-là. J’étais serein.
Qualitativement, il a été emballé (j’en suis convaincu). Mais quand je lui ai présenté mes objectifs (le quantitatif, donc), ça a coincé.
Confidence pour confidence, j’ai l’intime conviction d’avoir (inconsciemment) couler le deal. Oui, tout seul comme un grand. Pourquoi couler une affaire qui semblait si bien partie? Parce qu’à un moment, j’ai quitté la voie de la difficulté et j’ai pris celle de la facilité. Parce que j’avais peur de ne pas remplir mes objectifs, j’ai ôté de mon chemin les difficultés (i.e. des objectifs élevés). Comme l’a si bien dit Harvey Specter :
“You wanna lose small, I wanna win big”
Là fut mon erreur. Devants mes insécurités (irrationnelles), j’ai choisi de me priver d’un levier de motivation incroyable – la fameuse “désirable difficulté” – d’un challenge qui aurait pu m’apporter beaucoup. J’ai choisi la sécurité minus une marge supplémentaire de sécurité.
J’ai choisi, à un moment, la simplicité. Et cela ne m’a rien apporté. Ni le contrat. Ni l’expérience. Ni le challenge.
L’ excellence passe par la difficulté
La contrepartie serait qu’en face d’une telle montagne à gravir (Le Mont Excelsior), vous soyez tentés de ne rien faire, de procrastiner. Vous savez comment combattre cet autre fléau. Voyez le Mont Excelsior comme une suite de petites marches à gravir. Mais gravissez chacune de ces petites marches sans jamais céder à la facilité. C’est une démarche de chaque instant, mais qui vous sera infiniment bénéfique.
Cela rejoint en un sens, les discussions sur la chance, sur être séduisant/séduire. Nous y reviendrons une autre fois.
N’ayez plus peur de la difficulté. Embrassez la difficulté. C’est une amante des plus redevables.
Rémi
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en gros: soyez ambitieux.
@Julien: Le concept d’anormalité ne vous viendrait pas tant aux lèvres si Stéphane ne l’avait pas verbalisé. (voir aussi, démoniaque, connexion…) Et bien souvent, il vous sert surtout d’excuse pour ne pas vous sortir les doigts et ne pas vous confronter à votre trouille.
La stratégie de l’évitement de la difficulté est vouée à l’échec. Si dans quelque domaine que ce soit, tu souhaites être à l’aise, bon, prendre du plaisir… (tous synonymes dans le cas qui nous intéresse), tu devras te confronter à la difficulté. Pouvoir se concentrer sur son interprétation quand tu joues un air (= difficulté familiarisée). Esquiver un crochet et plonger dans la faille (= difficulté maîtrisée).
@BadStef: « A quoi bon se mettre des difficultés alors que la vie s’en charge déjà très bien ? » Et bien JUSTEMENT parce que la vie s’en charge très bien. Tu préfères ne pas être préparé aux cas où shit might happen?
Et enfin, si tu penses qu’avoir des objectifs ambitieux et esquiver la difficulté sont compatibles, tu devrais revoir tes objectifs à la hausse. L’ambition ne va pas sans la difficulté.
@Alfred Sta: « Et alors? » (pour paraphraser Gaspard Proust)
Au contraire, la pandémie du paradigme actuel essaie de nous vendre la difficulté comme la distinction suprême entre le peuple et l’élite, l’analyste quantitatif chez HSBC et l’intérimaire à la caisse chez Leclerc, le mufti et le jeune suiveur ecervelé, le technocrate et le citoyen lambda. Tout cela n’a aucun sens et est faussement entretenu dans la plupart des cas pour que le divertissment devienne la resignation de celui qui a compris que s’elever est trop difficile.
Excellent article.
Le « ease of use » se voit partout est réellement dégradant pour ceux qui choisissent de faire de vrais efforts :
casual gaming dans les jeux videos, les programmes « se muscler en 3 semaines », apprendre à se battre en regardant un dvd, apprendre une langue étrangère avec un guide mp3…
J’aime le concept d’embrasser la difficulté. Tout ceux qui l’ont choisi autour de moi sont aujourd’hui épanouis et forcent le respect autour d’eux. Ex : mon prof de danse qui pratique depuis 15 ans ou mon maitre d’arts martiaux qui nous a fait l’autre jour un speech « j’ai commencé le karaté en 1969 ». Silence et respect dans la salle.
J’abonde plutôt dans le sens de Julien.
Par ailleurs, il existe une idée qui tourne en boucle sur les sites de développement personnel, à savoir que 20% de l’effort fournit 80% du résultat. Ce rapport me paraît exagéré, mais en gros l’idée est que le perfectionnisme est une perte de temps et d’énergie qui n’est pas toujours justifiée.
En fait je crois qu’Augustin aurait du parler « d’ambition » plutôt que de « difficulté ». A quoi bon se mettre des difficultés alors que la vie s’en charge déjà très bien ? Je trouve au contraire qu’une personne intelligente et efficace est une personne qui met en place des stratégies pour (se) rendre la vie plus simple.
Maintenant viser des objectifs ambitieux est autre chose. Cela veut dire viser plus haut que les autres, ce qui pourrait demander plus de temps.
En séduction cela veut dire progresser plus, être plus séduisant, pour plaire à des filles plus belles, plus charmantes, plus exigeantes… Mais effectivement, si une fille nous met des bâtons dans les roues, soit c’est juste un jeu et il a ses limites, soit elle n’est pas intéressée et le choix de s’acharner relève du réflexe d’AFC qui risque encore de tourner à l’obsession amoureuse.
Pour reprendre la métaphore sportive, il faut effectivement s’imposer des difficultés à l’entrainement pour progresser, et que la compétition paraisse plus simple. La difficulté est alors un moyen, mais l’objectif est la facilité. Faire de la difficulté un but en soi me parait masochiste et sans fondement.
à mon avis, lorsqu’on poursuit des objectifs (sérieux) il arrive à moment ou les difficultés se pointent. là il faut les surmonter. Seulement rechercher volontairement la difficulté est une perte d’efficacité et de temps..
deux exemples me viennent en tete : le sport & la séduction. en sport la progression se fait souvent par palier. vous progressez tranquillement dans vos routines (facilité) à un moment donné vous stagnez, là il faut trouver de nouvelles méthodes de travail et allez chercher la progression dans le cambouis (difficulté). puis vous atteignez un autre palier de progression..etc
dans le domaine de la séduction, la difficulté est au contraire synonyme de régression. si vous cherchez volontairement la difficulté vous ne serez pas à l’aise et donc vous allez paraitre anormal. ce qui va flinguer toutes vos chances. pareil de l’autre coté : une fille difficile à atteindre, qui vous mets des batons dans les roues est une fille qui n’est tout simplement pas intéressée. si on cherche la difficulté on passera notre temps à essayer pour que ca marche (efforts tout à fait inutile), dans ce cas de figure vaut mieux chercher une personne qui vous facilite les choses, qui soit disponible/avenante..
Ou de troller en deux phrases des gens qui se sont casse le cul à en pondre cent.
La facilité, c’est aussi de repomper le logo de The Guild of Food Writers plutôt que de dessiner soi-même une plume de stylo.